13 avril 2015

Technicien: Lidl, lundi, 17 heures

Après un rendez-vous du pôle emploi qui n’aura encore abouti à rien, et que j’ai réussi à reporter à la semaine prochaine, je me rends compte que mon périple initiatique de samedi dernier nécessite une suite immédiate.

Il me manque des produits de première et moyenne nécessité. Je constate en arrivant qu’il y a une moyenne de cinq gros culs dont le caddie est farci à ras-bord par caisse.

Je prends un de ces paniers hybrides, trop volumineux pour qu’on puisse le soulever par la hanse, trop ridicule pour être tiré par une poignée, et choisis la deuxième option. N’ayant aucune liste, je me fie à mon instinct grégaire et mesquin, lequel me trompe depuis le premier jour de mon existence, ce qui constitue à mes yeux le seul parti pris viable. C’est la raison je me suis retrouvé avec des articles aussi incongrus que du maasdam, des saucisses viennoises, des spéculoos ou des filets de truite fumée. La réappro tombe le mardi (complètement débile, puisque c’est jour de marché), et c’est pourquoi j’ai toutes les peines du monde à trouver un clone discoune de boursin sur le rayonnage.

Je note: une femme voilée qui regarde un emballage de quiche lorraine industrielle entre deux doigts, puis après avoir vu la composition, s’en débarrasser le plus prestement possible; un enfant qui chiale sans aucune raison; deux reunoises à fond dans le swag qui n’ont d’autre choix, pour sortir du magasin, que de couper la file d’attente et se justifier de n’avoir rien à acheter, et la femme qui attendait derrière moi qui faisait montre de son exaspération et souhaitait sans doute que tout se passe plus vite. Elle achètera une bouteille de blanc, une boîte d’un kilo de glace au tiramisu (?) et d’autres choses que j’ai oubliées. La promotion sur les chips mexicaines que Lidl a le bon goût d’appeler tortillas rencontre apparemment un grand succès.

La caissière approche des quarante ans, et dégage un sentiment d’impuissance et de frustration dans son travail, qui contraste avec sa carrure impressionnante. Elle a des cheveux au carré avec un impressionnant travail de mèches. Elle a les yeux bleus. Le badge accroché au gilet de son uniforme indique un prénom kabyle. Je suis plus rapide à remballer que les clients qui me précédaient, elle semblerait m’en être reconnaissante, ce qui m’attriste encore un peu plus. Je compatis sincèrement sans pouvoir dire autre chose que des remerciements, et bonne soirée madame.

J’en ai pour vingt-deux euros. Je remonte à la maison avec une bonne quinzaine de kilos de choses et d’autres. Ce dernier aspect me satisfait profondément. Je mets à ce Lidl vespéral un bon 8.5 / 10, puisque je n’y ai pas trouvé ce que j’étais parti chercher en preums (des amandes effilées et des amandes en poudre) mais tout en sachant d’avance que c’était une cause perdue.